Le prix Nobel de chimie 2015 récompense des travaux sur la dégradation spontanée de l’ADN, dégradation spontanée dont l’étude a conduit à la validation de la technologie Imagene.
L’attribution du prix Nobel de chimie reconnaissant la contribution de trois chercheurs au domaine de la réparation de l’ADN est importante pour qui s’intéresse à la stabilité -et la conservation- de l’ADN. Alors qu’il était connu, avant les années 1970, que l’ADN agressé par des facteurs physiques (les UV par exemple) pouvait être réparé in vivo, c’est Thomas Lindahl qui le premier a suggéré qu’il pouvait subir une dégradation spontanée, probablement par hydrolyse, dans les conditions physiologiques, hypothèse contraire au sentiment général de l’époque qui était que la stabilité de l’ADN d’un organisme était telle que l’intégrité de la molécule était garantie à vie. Cependant, pour valider son hypothèse, il lui fallait déterminer la vitesse d’hydrolyse dans les conditions physiologiques, en particulier à 37 °C, pour montrer qu’elle était significative. Mais cette vitesse était trop lente pour pouvoir être déterminée à cette température. Il s’est alors placé à plusieurs températures élevées pour déterminer la manière dont la vitesse de dégradation variait en fonction de la température. Il a constaté que dans la gamme de température utilisée, cette vitesse de dégradation suivait la loi d’Arrhénius*, comme celle de la plupart des processus chimiques. A partir de ces déterminations, il a pu déterminer la vitesse d’hydrolyse à 37 °C par simple extrapolation. Il a ainsi pu montrer que cette vitesse n’était pas négligeable et par voie de conséquence, in vivo, le maintien de l’intégrité de l’ADN, nécessaire à la survie de l’organisme impliquait l’intervention de mécanismes de réparation, ce qui a ouvert ce champ de recherche.
L’utilisation de la loi d’Arrhenius, fondamentale, ici, quoique, très générale, repose sur une extrapolation dont certains peuvent contester la validité. Cependant, dans cet exemple, aucun fait n’est venu mettre cette validité en doute et de nombreux autres travaux de Lindahl et d’autres auteurs ont confirmé la validité de cette approche, comme les travaux d’imagene mettant en évidence une haute stabilité des acides nucléiques, à température ambiante, dans des conditions adéquates de conservation.
*Celle-ci stipule qu’il existe une relation linéaire entre le logarithme de la constante de vitesse d’une réaction et l’inverse de la température absolue à laquelle elle a lieu, ce qui se traduit graphiquement par une droite. Ceci permet, par simple prolongement de celle-ci, d’obtenir la vitesse de dégradation à toute température, en particulier 37 °C ou 25 °C.
Jacques Bonnet
Professor Émérite à l’Université de Bordeaux, biologiste moléculaire et chimiste, et co-fondateur d’Imagene.